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Une collection privée française - Archéologie, Haute époque et Grands Siecles

mer 20 Sep 202314H00

HÔTEL DROUOT HÔTEL DROUOT Salle 4

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Estimation
80 €
80000 €
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Lot 5

Portrait de jeune homme en collerette

Panneau de chêne, deux planches, renon parqueté 47 x 36,5 cm Annote en haut : prosentis contennis mélioratif spero / ano dni 1623 Aetatis 23
Lot 20
peint polychrome partiellement doré représentant le Christ Italie ou Espagne, XVI/XVIIè siècle H: 90 - L : 84 cm
Lot 33
l'une représentant le Christ France ou Espagne, XIVè/ XVè siècle H : 90 cm - L : 100 cm Un bras détaché, traces de polychromie L'autre en bois peint...
Lot 34
décoré de plaques en os sculptées représentant des personnages ; le couvercle orné de 'intarsio' (marqueterie) à motifs géométriques mélangeant bois...
Lot 69
peint polychrome et doré probablement représentant Sainte Lucie Italie, fin du XVIIè/ début du XVIIIè siècle H : 82 cm
Lot 74
en terre cuite de forme méplate, à décor en haut-relief, sur la face principale, de l’Agneau de l’Apocalypse, couché sur le Livre des Sept Sceaux, sur...

Informations sur la vente

Une rentrée sous le signe de la collection... La Maison Millon est heureuse de présenter à la vente une collection française privée consacrée à trois grands domaines: Archéologie Haute époque Tableaux anciens Un sélection guidée par l'oeil d'un amateur attiré par la force évocatrice des objets, la rareté et l'originalité. Ainsi, un François de Troy présentant un original portrait de Claude Le Blanc à la tasse de thé dans une magnifique tasse en porcelaine, un rare panneau, école Catalane présentant La Vierge Marie, un coffret exceptionnel en bois et placage d'os datant du XIème siècle, un impressionnant retable représentant la Passion du Christ, trésor de sculpture et de peinture, une très rare pièce du service Bleu Céleste de Louis XV réalisée par la Manufacture de Vincennes et bien d'autres trésors à découvrir à Drouot, le 20 septembre. Un goût, deux périodes, un thème Durant 25 ans j’ai collectionné, avec joie, achetant essentiellement à Londres ou où je vivais et en France, divers objets anciens qui, pour l’essentiel, se rattachent ou à l'archéologie ou au Moyen-âge -la haute-époque-. Un goût venu de l’enfance, renforcé durant mes études, de philosophie et de théologie. Mon mémoire de l’époque probablement mit "le feu aux poudres", qui étudiait certains concepts liant St Augustin et Duns Scot. Car c’est déjà là, finalement, la clé, le “fil rouge” -et aussi le fond- de cette collection. L’antiquité et le moyen-âge. Il est une continuité, sur le fond, de l'Antiquité au Moyen-Âge, voulue, explicitement, par ces penseurs, et donc essentielle ; et un glissement de l'un à l'autre, bien entendu. J’ai voulu saisir, appréhender ces réalités, conceptuellement, mais aussi de façon sensible, par la présence concrète des artefacts produits par les esprits et les mains de ces personnes, à la fois si proches, dont nous sommes issus, et pourtant totalement étrangers. Ces objets sont comme des bulles d’un air autre, qui auraient par extraordinaire voyagé jusqu'à nous depuis des mondes différents, et qui éclateraient dans le nôtre, libérant un parfum étrange et qui pourtant ne nous est pas totalement étranger… La religion Il m’a toujours paru, d'autre part, qu’au-delà des réalités mondaines, sociales, politiques mêmes, la religion, le spirituel, forment la couche la plus profonde de l’expérience humaine et que tout le reste se meut comme dans son orbite, lui est subordonné. La divinité se définit elle-même comme Ce qui Est, par-delà le Temps, c'est-à-dire Ce qui fait que ce qui est Est. Un Romain aurait sans doute plutôt perçu comme Principe de Vie ces ”deos semper vivos”, et un Grec possiblement comme source de toute Vérité. Le “ego sum via etc.” christique, soit dit en passant, ramasse en une formule unique ces différents points de vue. Avec de telles définitions, le postulat de la centralité du fait religieux, loin de paraître audacieux, passerait presque pour tautologique! Peu importe s'il l'est : il rend compte comme nul autre de la hiérarchie des choses humaines. Il a d'autre part l'avantage, en ce qu'il est parfaitement anachronique, de peindre notre modernité comme une énigme ou une absurdité, ce qui là aussi un point de départ des plus raisonnables. La religion, donc - mais prise en un sens très large !- est le thème commun de l'assemblement ici présenté. De St Augustin, des origines romaines et philosophiques de notre chrétienté, jusqu'à Duns Scot, qui posa le fameux "principe d'individuation”, de l’antiquité classique au moyen-âge finissant, avec "la" religion en son centre : voilà notre sujet. Nous nous évaderons pourtant, comme on le notera au premier coup d'œil, allègrement par-delà ses bornes, quoique sans jamais tout à fait le perdre de vue. Les périodes préclassiques Nous avons un certain nombre d’objets issus des civilisations ”préclassiques”, du mur d'Hadrien aux satrapies de la Perse, d’une grande diversité donc, mais qui aussi partagent une certaine communauté civilisationnelle. Pourquoi cela? La nature de l’homme religieux -un pléonasme pour à peu près tous nos prédécesseurs- nous est récemment devenue si étrangère que nous peinons à comprendre les ressorts de son esprit ou les concepts qui lui étaient naturels. Il est fort probable que l’homme médiéval ait eu plus en commun dans sa religiosité avec nos aïeux des temps les plus reculés qu’avec nous-mêmes. Prenons nos sedes sapientae par exemple, dont le type fait irruption peu après l'an mille : elles révèlent un rapport de l’homme à l'objet figurant la divinité fort différent des objets de dévotion qui allaient lui succéder. Cette évolution, ainsi que la condamnation datant des Réformes, associant la dévotion traditionnelle à un fétichisme ou à la superstition, continuent presque nécessairement d'entacher notre jugement à leur égard, même sans caractère dépréciatif. Or il est une théologie profonde et essentielle de Marie, trône de sagesse, portant et présentant le principe du monde, et qui fut alors renouvelée par rapport à son origine byzantine. Cette théologie, bien entendu en soi absolument conceptuelle, idéelle, est par ces statues rendue sensible, et certainement immédiatement ressentie, comprise par le fidèle. Le référant dogmatique de ces sedes est explicitement l'incarnation, comme pour toute vénération mariale, Christ étant "Incarnatus ex Maria Virgine". Mais il l'est ici doublement, l'étant aussi par son mode de représentation esthétique. En effet dans cet art l'Idée est rendue sensible sans médiation aucune -d'où la suspicion de fétichisme-, réitérant pour ainsi dire de façon concrète que "le logos se fait chair". Ceci est à la différence des modes esthétiques ultérieurs pour lesquels une part d'interprétation intellectuelle, pouvant aller jusqu'au symbolisme, ou au contraire usant du truchement de l'émotion, sera chargée de porter l'Idée, l'illustrant. Cette Identité de l'Idée et du sensible, n'est pas une caractéristique particulière des sedes. Si ce caractère disparaît à des époques ultérieures il est au contraire partagé avec l'essentiel de l'art religieux antérieur. Une proximité avec l'art des périodes reculées nous aide à comprendre ces différences, c'est là l'un de ses intérêts. Je n’aurai pas la témérité, pour conclure là-dessus, d’avancer que nos sedes ont beaucoup en commun avec la Cypris hiératique du VII siècle, par exemple, ou le kouros archaïque en bronze également présentés, mais il me semble que, associés a un peu de réflexion, de tels parallèles permettent d'ouvrir d'intéressantes perspectives. De même l'étalement de ces objets sur un temps historique long nous permet d’envisager les linéaments des thèmes religieux à travers les civilisations, qu’il s’agisse d’Ishtar-astarté, et cypris-Aphrodite, ou encore de la maîtresse des animaux, potnia theron, Artémis, etc., toutes figures continuées en quelque chose dans la religion chrétienne traditionnelle. Pousser trop loin les rapprochements, vouloir leur donner une qualité scientifique, et y chercher des filiations effectives, peut s'avérer artificiel. Il s’agit encore plutôt de mises en parallèle qui permettent une meilleure familiarité avec chacun de ces types. La période moderne Quelle que soit la puissance et l’attrait que donc je trouve à ces plongées vers les origines, il reste que, en ce qui me concerne, l'intérêt pour le passé résulte in fine d’une interrogation sur nous-même sur le présent. La question alors qui commande tout ce parcours est la suivante : pourquoi sommes-nous si différents de tout ce qui nous précède et qui constitue pourtant la glaise dont nous sommes faits? Ou encore, pour le prendre à rebours : ne sommes-nous pas en réalité autre que ce que nous croyons être, nous qui nous pensons essentiellement profanes et rationnels avant que d’être religieux, matériels avant que spirituels, individuels avant que sociaux? Une telle construction correspond à un étrange retournement de la hiérarchie de l’ordre traditionnel. De deux choses l’une: ou nous avons effectivement réussi ce tour de force d’une transmutation de notre nature ; ou celui-ci n’est qu'apparence et la réalité est essentiellement inchangée. Si ainsi l'état des lieux traditionnel, dont les objets que nous avons réunis nous renvoient une image diverse mais cohérente, règne toujours fondamentalement, il ne le fait plus aujourd'hui avec notre concours conscient, mais comme malgré nous. Le prix de cette situation fausse est que notre intelligence elle-même ne participe plus de cet ordre général, elle qui était pourtant faite précisément pour cela: "ad imaginem Dei creavit illum" Nous explorons donc aussi ces derniers siècles, ceux qui vivent du "principe d'individuation" justement mis à jour par notre auteur, afin de saisir ce qu'il y subsiste de ce qui faisait la trame de la vie depuis la nuit des temps. Nous nous aventurons au moins jusqu'à la fin du dix-huitième siècle et dans des parages qui semblaient profanes, traquant le religieux là où il put se métamorphoser. L’Espagne On remarquera un intérêt spécial pour l’Espagne, de l’âge roman au baroque, dans la statuaire, le mobilier et la peinture. C’est peut-être là le “cœur du sujet” ou du moins l’un d'eux. C’est que je crois que l'Espagne eut un rôle prédestiné en ce qu'elle posa pour nous une modernité "différente", lourde justement du limon des âges anciens, et pour cette raison, forte et vivante, porteuse d'avenir. Là où l’Italie, chantée du fait du chatoiement de sa diversité, en réalité s'appauvrit sur le fond, dès la fin du 14 e siècle, l’Espagne, enrichie d'une matière venue du Nord, renouvelée au creuset de sa foi intacte, bâtissait la vraie modernité par la cohérence de sa théologie, celle qui bientôt allait irriguer l'Europe. La France de Louis XIV a le regard tourné vers les solutions venues d’outre-Pyrénées, -voir Corneille ou les Saints du grand siècle-. Le centre de l’expérience espagnole est qu'avec elle le rationalisme des temps nouveaux, loin de combattre le legs spirituel commun, prend au contraire celui-ci comme socle, comme l'avait tenté la scolastique classique avant le coup d'arrêt de 1277. Elle fonde ainsi le monde nouveau dans la continuation de l'ancien. L’urbanisme aux plans géométriques de la nouvelle Espagne (Puebla de los Angeles, 1531) ou encore, en architecture, le palais dit de « Charles V » (1527) à Grenade, sont des créations de l'esprit où l'on sent cette "pure" rationalité pour nous la marque du XVIIe siècle européen, quoique l’on soit ici au premier XVIe siècle! Crucialement, rien ici, par contre, de la sécheresse coutumière à notre classicisme. Cette Hispania profondément romanisée, tout à son expansion du XVe et XVIe siècle, évita le poison du doute qui ailleurs en Occident acheva le moyen-âge et créa un chiasme séparant les temps nouveaux de la source vive qui irriguait notre civilisation depuis ses origines. En peinture nous commençons avec notre gothique Sainte Anne, nouvelle Athéna, patronne de la science, ici d'une présence extraordinaire, d'une grande sévérité hiératique et tout à la fois riche de toute cette matière et de ces ors que permet l'embutido. C’est une caractéristique de cet art que ce mélange d'ascétisme et de volupté matérielle, ce dernier mis entièrement au service de l’esprit. Un contraste que l’on retrouve dans un contexte un peu différent peu après, dans les sculptures paroxystiques de la passion. C’est, dans les deux cas une représentation sensible du mystère essentiel du christianisme, l’Incarnation, de ce que l'Idée est pour nous en tant qu’elle se fait chair, que la chair n’est que pour et par l'Idée. De là passons à notre sainte Hélène renaissante, hsp, aux traits précis, indifférente à tout idéal formel. Tout ici est ordonné à l'essentiel, en l'espèce la présentation des plus insignes des reliques, la vraie croix et les instruments de la passion, reliques par excellence en ce qu’elles sont la preuve tangible de la résurrection. Leur inventeur -qui soit dit en passant les offre à la romaine, les mains recouvertes d’un drap-, indique ainsi au roi “très catholique” le rôle de soutien essentiel de la religion qui définit la royauté. Théologiquement il s’agit de confirmer l'irruption du divin dans notre monde terrestre, par ces signes essentiels et récurrents au moyen-âge, qui lient la terre et le Ciel. Une déclinaison là encore de la figure centrale de l’Incarnation, de Dieu rendu présent en ce monde, cette fois au sein de l’Histoire. L’esthétique ici, de façon très caractéristique, adopte les codes de la renaissance tout en rejetant les principes. Ainsi, suivant la tradition médiévale, l'intention théologique reste seul maîtresse de la forme, à l’exception de toute règle ou limitation qui serait posée indépendamment, antérieurement à elle. Or c’est justement le rejet d'une telle position qui constitue l’essence de l’innovation renaissante, comme nous l'évoquerons plus bas. Trente, ce concile espagnol, fut un édifice élevé moins contre la Réforme que contre les tentations profanes de Venise et Florence. S'il suscita bien-entendu, en art, un style, son rôle essentiel fut de passeur des idées vivifiantes du passé vers la modernité, sous des formes renouvelées, adaptées au temps, mais avec toujours comme objectif la fidélité -autant qu’il fut possible!- à l'essentiel. Cette refondation fut la base sur laquelle l'Europe prospéra encore, quelques siècles durant. Dans son sillage nous avons le couple d’anges sévillans, l’armoire tabernacle, le beau niño de l'atelier de Juan de Mesa, saint Antoine de Padoue ou le buste reliquaire de st Placide, certains traités en en bel estofado. D’autres encore. "Illustrer et éduquer", non pas adorer, est le motto nouveau. Mais c'était déjà celui par lequel la chancellerie de Charlemagne avait tancé l'empereur d'Orient. Plus avant encore il décrirait aussi assez bien le projet narratif des mosaïques de santa maria maggiore, à l’aube de l’art chrétien. Et tout à la fois ces sculptures sont pourtant plus que cela, en filles des statues de dévotion du moyen-âge central que nous avons évoqué plus haut. Moins que des icônes, plus que de grandioses figures de théâtre. Le baroque espagnol, est arrimé à la grande tradition occidentale, en dépit de sa nouveauté, dans ses ambiguïtés mêmes: il participe de la même chair. L’Antiquité Rien de plus rafraîchissant pour nous modernes, formés ou déformés par ces "retours aux sources" qui sont plus réellement des reniements de notre héritage substantifique, je veux dire la Renaissance, le Classicisme, etc., que de véritablement fréquenter l'Antique. Rien de plus salutaire que de s’immerger aux sources mêmes de notre art et de notre civilisation, d'y découvrir sa richesse, son inventivité, sa cohérence, pourtant, sa simplicité. Ainsi sont par exemple nos pygmées attaquant un cygne, fragment de fresque du second siècle, pleine de douceur et de fantaisie, à l'image des enfants de Cazale, plus tardifs. Aussi regardons les animaux dans l'art à travers la durée. Au moyen-âge ils ont un caractère enchanté, l'humain et l'animal sont liés et mêlés, comme en littérature par exemple dans le roman de Renart. L'art nous en donne par leurs faciès où s'exprime l'âme humaine dans ses figures multiples, des illustrations renouvelées. Animaux humanisés par procédé de narration picturale ou panthéisme de la nature subsistant, par lequel nous nous reconnaissons en elle? Ainsi ces chevaux semi humains, qui nous rappellent ceux d'Achille dialoguant avec lui, comme celui de notre fragment de retable frappé au fer d'Anvers. Les animaux de l'antiquité sont tout autres. Ils ne sont certes pas neutres et indifférents comme chez les modernes mais ne sont non plus humanisés comme ils le deviendront au moyen-âge. Ils nous sont liés en quelque chose, ils ont une "personnalité" que nous pouvons sentir, mais ne sont pas dans une totale familiarité avec nous. Nous en avons plusieurs beaux exemples: nos aigles aux plumes nettement dessinées ou encore ces lions en bronze, dont notre belle large tête d'un heurtoir, sans oublier, en marge de cela, notre lion ou guépard en pierre de El Andalous. L'existence de cet entre deux entre identité et altérité est un des traits particuliers de l’esprit romain non sans conséquences historiques. L’autre, le Barbare, l’Etrusque, l’Egyptien est à la fois différent mais fait partie d’une même communauté humaine avec des dieux qui, s’ils lui sont propres, sont comme cousins des nôtres. Ainsi Ra considéré dans l'épigraphie comme une version locale d'Apollon. Ainsi aussi la fameuse translation de l’étrusque Uni de Veii, afin de rejoindre la triade capitoline. “Visne Roma ire, Iuno?”. Reflet d’une certaine manière de cet universalisme respectueux des identités locales, notre masque féminin, romano-égyptien, qui se détache par sa qualité parmi les productions de ce type, intéresse justement parce qu’il renvoie également à ces deux cultures. Attachants et intéressants aussi ces deux beaux témoins des empires Parthes et sassanides, pendants de Rome, aux portes de l'Orient : une cuillère en argent au griffon et un plat, d'argent aussi, aux scènes agraires, qui nous ouvre aussi une perspective vers l’Orient médiéval, musulman, qui hérita de ces formes. La sculpture médiévale J'ai un goût particulier, en sculpture, pour les groupes. Ils permettent un élan, un échange, une narration au-delà des possibilités de la sculpture individuelle. Ainsi est notre grand groupe de montée au Golgotha, truculent (premier XVIe, Burgos ?). Et bien entendu le grand retable d'Anvers (1500). Celui-ci, suivant en cela tout le moyen âge, use dans sa narration d'une unité de lieu qui ne répugne pas à assembler en une même scène des éléments disjoints temporellement voire dupliquant les personnages centraux. C'est là une caractéristique, qui allait s’achever, et dont la répudiation serait le signe d’une profonde rupture des schémas de pensée. Jusqu'ici la connaissance dans sa généralité était nécessairement hiérarchisée, et ordonnée comme en son centre au Premier Principe, depuis l'aristotélisme, et sous d’autres formes plus haut encore. Par une mutation qui ne touchait pas à l'essentiel, au temps de l'Eglise c’est le Christ qui devint le pinacle et garant de toutes choses, et en premier lieu de la possibilité d’une connaissance: "unum omnium magister Christus" pour reprendre le titre d'un fameux sermon de Saint Bonaventure. Il en résulte que l'esprit humain est d'emblée adéquat au monde puisque le Créateur des deux, Dieu, est Lui-même Intelligence, et que ce caractère est communiqué à la fois à l'homme et au monde. Toute intelligibilité d’autre part, se ramène naturellement à ce même principe premier ; elle n’existe pas en soi. C'est là à la fois sa nature et sa finalité. Pour la Renaissance, comme nous l’avons évoqué, qui croit trouver en Rome une rationalité en soi, “laïque”, la situation est autre. Il est un cadre rationnel formel, dont les règles s’appliquent à tous, en ce monde, et dont "Dieu même ne saurait s’abstraire". En résulte comme une seconde expulsion du paradis en ce que notre monde se découvre dans un certain éloignement de Dieu, ce qui peut à rebours se voir comme une nouvelle autonomie. Les deux sphères, la divine et l'humaine, dans tous les cas, ont perdu leur intimité antérieure. La perspective, ou encore les règles abstraites du beau idéal, illustrent symboliquement cette raison nouvelle, à la fois émancipatrice pour l’homme en ce qu'elle est sienne, et asservissante car elle est d’airain, et ne ramènent plus à l'auteur de toute Paix. Le second retable , le petit retable allemand, de piété privée, est une des plus belles pièces que nous ayons, de par la grâce de sa sculpture magnifiant idéalement le thème délicat de la Visitation, avec aussi ces figures peintes qui évoquent d’une façon intime les scènes de la liturgie du moyen-âge finissant -les processions aux chandelles, les pèlerinages-. Le déhanchement caractéristique des deux femmes dans la représentation de ce mystère, illustre la communication des deux enfants non encore nés, l’un divin, l’autre son annonciateur, et qui se transmet aux deux mères sous forme d’une joie profonde. D'une part il s’agit des prémices de la vénération de “la mère de mon Seigneur” et pourtant tout aussi bien cela reste une scène de la plus grande simplicité et familiarité, entre deux cousines toutes à la joie de leur conception prochaine. Cet objet est aussi d'une grande rareté. Le fils d'Élisabeth toujours, Jean le Baptiste, est ailleurs représenté cette fois dans un calcaire XVe siècle, avec reste de polychromie. Il est d'une facture résolument régionale voire locale et pourtant, voire peut-être grâce à cela -car il échappe aux formules d'école- est fort intéressant, pour au moins deux raisons. Premièrement son style puissant voire rugueux illustre l'ascétisme et le caractère sauvage de celui qui "était vêtu d'une peau de chameau et se nourrissait de sauterelles". D'autre part sa figuration est entièrement rassemblée autour de la fonction de l'annonciateur du Sauveur, montrant d'un long doigt l'agneau, mêlant joliment réalisme et symbolisme. La figure de l’ecce homo constitue une fenêtre sur les interrogations de la métaphysique. Le Quid est Veritas de Pilate toujours résonne dans la proximité de la mort et du sacrifice, nous rappelant que pour la théologie l’absolu jaillit des tréfonds du néant, “dans le ventre de la terre trois jours et trois nuits”. Avant que de révoquer la loi mosaïque pour fonder un mode nouveau de la présence divine, Christ, dans la parabole de la femme adultère, “resta silencieux écrivant avec les doigts sur la terre”, rite immanquable d’invocation des puissances telluriques. Nous présentons deux exemples de Christ aux liens forts différents, mais en quelque chose semblables. Le grand, qui ornait la chapelle d'un cimetière de village dans l'Avesnois, 1500 est bouleversant. Il est le plus beau de ce type -commun à cette époque - qu'il m'ait été donné de voir et l'une des plus belles sculptures de la présente collection. C'est une des rares œuvres, selon mon expérience, qui ait le pouvoir de captiver et d'amener à un état contemplatif des esprits qui viennent d'horizons différents et soient tout ignorants de cette spiritualité. Le second, baroque espagnol, est aussi très touchant, dans une méditation profonde et d'une carnation à la fois réaliste et d’un translucide idéel qui renforce la tension de la chair vers l’au-delà. C’est un bon exemple de la façon dont l’art espagnol du XVIIe siècle, oriente son vocabulaire vers l’intime et le sentiment, non pas par influence des émotions profanes mais par un mouvement opposé de la théologie qui grandement affecta en retour la sensibilité commune, en Espagne d'abord, ailleurs ensuite. Ainsi le moment de la passion, dénué de pathos dans la tradition antérieure et l'Écriture même, devint le point focal de la théologie de l'époque, comme meilleure illustration du pivot du sacrifice divin rachetant l'humanité. En ces temps de passage à l'expérience individuelle de la piété au-delà de la pratique collective traditionnelle, il apparut aussi particulièrement adéquat au ressenti individuel, permettant pour soi une “imitatio Christi” par la projection et le sentiment. L’aboutissement de cette évolution en art est illustré avec notre enfant Jésus du XVIIIe. Un chemin certainement non dénué de risques. Héritages Nos tableaux modernes eux-mêmes n'échappent pas réellement au thème religieux ni à l'héritage antique. Ainsi le Louis XVI du sacre, peinture de qualité parmi ses équivalents, évoque le caractère fondamentalement sacré de la personne royale. La plus ancienne épigraphie qui nous vienne de Rome, la lapis niger du forum, laisse déjà transparaître le roi originel comme un rex sacrorum, un quasi prêtre. Louis XVI était en acte comme en mots pénétré de principes prérévolutionnaires -le premier, par exemple, il qualifia crucialement le tiers d'assemblée nationale- et comme la plupart de ses contemporains, nobles compris, il ne comprenait plus la logique organique de la société monarchique, telles par exemple qu'elle fut énoncée une dernière fois lors du fameux discours de la flagellation. Et pourtant, s'il reste un sentiment partagé largement durant de ces années tragiques, c'est celui de la sacralité intrinsèque du monarque et donc de la perte irremplaçable, de l'abaissement pour la natio francorum et pour chacun, qui résulte de l'avilissement de la personne du roi, puis de sa destruction irrémédiable. Les témoignages de l'époque, de quelque part de la société qu'ils proviennent laisse cela transparaître sans ambiguïté. Symboliquement les "rien" du carnet cynégétique, rappels du rôle obsessionnel de la chasse jusqu'aux derniers instants, nous renvoient aux chasses au lion mythiques et extraordinaires du fondateur de la figure royale même pour tout notre bassin civilisationnel, Assurbanipal (British Museum). Le représentant symbolique de la société, intermédiaire entre les hommes et Dieu, avait toujours été un maître des animaux. Son funeste effacement allait prolonger au politique la rupture entamée de notre monde vis-à-vis de son héritage. Louis XVI, d'une certaine manière n'a pas régné : son premier geste politique, le rappel des parlements et le renvoi du triumvirat, fut aussi son dernier. Il annula la victoire de son prédécesseur sur le parti qui, son règne durant, avait souhaité l'abattre et la monarchie avec lui, et se livrait ainsi à eux sans retour. Louis XV, notre dernier roi, donc, dans le plein sens du terme, fut le plus attachant des hommes, dans ses faiblesses mêmes. Il était doté d'un grand instinct politique ("je répugne à défaire ce que mes pères on fait") hélas gâté par son indécision et l'influence des femmes. De ce souverain nous avons un précieux souvenir : un sous plat venant du mythique service bleu céleste. Celui-ci se distingue par la beauté de son coloris et de ses peintures et la nouveauté de son procédé. Notre pièce provient des premières années de production (LL: 53-54). Le Duc de Croÿ évoque dans ses mémoires comment Louis XV fit admirer le service à sa livraison aux habitués des petits couverts. L'on peut ainsi imaginer que le roi a possiblement pris en ses mains cet objet aujourd'hui offert à nos sens pour le présenter à ses intimes et en vanter les mérites. Quant à notre grand format, de van Loo, n'échappe-t-il pas, lui, à notre thématique ? Au contraire ! Avec tout le charme de la Régence on a là une figure de Pater familias (Maine?), héritage fondamental de Rome encore alors conservé dans toute sa chair, avec le dominus bienveillant, un père en présence de ses enfants, éloigné de toute figure féminine. Cela est d'un parfait naturel et en même temps rien n'est plus essentiel, c'est-à-dire empreint de gravitas religieuse. Qu'était-ce que la Pietas? Non pas la piété religieuse, comme nous l'entendons aujourd'hui, mais le respect dû aux ancêtres et en premier lieu au père. Une attitude que l'on associait à la pérennité de la vie elle-même, à la rectitude de son existence et finalement au maintien de la paix, dans une acception large, pour ainsi dire métaphysique. Cette conception antique est ici encore perceptible, qui rend ce tableau si envoûtant non seulement au premier coup d'œil mais surtout dans la durée, pour qui a la chance de vivre dans son aura. Plus simplement, notre charmant jeune Foote, en costume, dans la stoïque Angleterre du XVIIIe siècle, qui appartint un temps à M. Mould, participe plus modestement du même mouvement. Unique Enfin, au pinacle des œuvres fascinantes et mystérieuses il faut compter ce coffret daté au C14 de peu après l'an 1000. Le lien apparent au style de Bayeux peut être une fausse route car il ne ressemble pas à la production siculo-normande. On le donne comme mosan. Ses parois présentent des motifs alternativement religieux et profanes, guerriers et symboliques, marins et terrestres, certains évoquant l'art Ottonien ou byzantin (les anges). Quelle est sa fonction ? Coffre, arche, autel portatif ? Et sa destination? En dépit des études intéressantes qui tentent de le cerner, le mystère demeure. Il en est ainsi des objets uniques.

Notre commissaire-priseur

Alexandre MILLON

Alexandre MILLON

. amillon@millon.com

Notre responsable de la vente

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Mayeul de LA HAMAYDE

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