Shah ‘Abbas Ier recevant Vali Muhammad Khan
Iran qajar, Téhéran, Atelier de 'Ali Muhammad Isfahani, circa 1880-1885
Importante plaque rectangulaire en céramique moulée à décor peint sous glaçure transparente (fêle de cuisson).
90 x 62 cm
La scène représentée reproduit en partie la réception de Vali Muhammad Khan par Shah ‘Abbas Ier, peinte sur le mur nord-est de la salle de réception du palais Chehel Sotun à Ispahan dans les années 1660. Certains groupes de figures sont copiés quasiment in-extenso ; Au premier plan de notre plaque, on retrouve le joueur de kamancheh, deux femmes partageant une coupe, et l’homme donnant à boire dans la bouche d’un autre endormi. Le joueur de flûte regardant le spectateur, à gauche, provient également de cette peinture. Les deux souverains, au centre de la partie supérieure de la composition, sont également adaptés de la peinture murale, comme le montre le geste de Shah ‘Abbas Ier posant sa main sur la garde de son épée, ou encore la manche de Vali Muhammad Khan tombant sur le sol. Les visages des deux souverains ont toutefois été modifiés, Shah ‘Abbas Ier ayant perdu sa moustache caractéristique, et Vali Muhammad Khan ayant été coiffé d’un turban qizilbash. Se faisant, la composition perd son iconographie première au profit d’une scène plus générique dans le goût safavide.
Cette importante plaque s’inscrit dans une large production de céramique moulée et peinte sous glaçure, à l’iconographie inspirée des peintures et céramiques d’époque safavide (1501-1722). Les carreaux de céramique de cette production montrent beaucoup de portraits de cavaliers ou des scènes galantes au sein de paysages plus ou moins développés. Un exemple conservé au Victoria and Albert Museum (230-1887) entre dans cette catégorie et est particulièrement intéressant pour la bordure végétale placée au-dessus de la scène, très similaire à l’encadrement de notre plaque.
Le grand intérêt de notre plaque, outre sa taille et sa qualité, tient du fait que son iconographie est largement inspirée d’une peinture safavide connue. Ce genre de plaque de revêtement est plus rare que les scènes génériques telle que celle du V&A. On en trouve un exemple dans la maison de l’artiste américain Frederic E. Church (1826-1900) à Olana, sur une des cheminées entièrement couverte de carreaux produits sur mesure, et dont celui au centre est une copie du panneau d’époque safavide du Metropolitan Museum of Art (03.9c). Le peintre-céramiste qajar ‘Ali Muhammad Isfahani, auteur des carreaux d’Olana et d’un autre conservé au Victoria and Albert Museum (512-1889), semble s’être spécialisé dans la copie des scènes safavides. Notre plaque peut être rattachée à son atelier par sa grande finesse d’exécution et son iconographie particulière.
Références :
Sussan Babaie, ‘Shah ʻAbbas II, The Conquest of Qandahar, the Chihil Sotun, and Its Wall Paintings’, Muqarnas 11 (1991): 125–42
Robert D. McChesney, ‘Four Sources on Shah “Abbas” s Building of Isfahan’, Muqarnas 5 (1988): 103–34
Mary Roberts, ‘Worlding on the Hudson: Frederic Church and Global Histories of Art’, Art History 45 (2022): 518–44Jennifer M. Scarce, ‘’Ali Mohammed Isfahani, Tilemaker of Tehran’, Oriental Art 22 (Autumn 1976): 278–88.
Jennifer M. Scarce, ‘’Ali Mohammed Isfahani, Tilemaker of Tehran’, Oriental Art 22 (Autumn 1976): 278–88.
Provenance :
Collection particulière française avant 1962.
Acquis dans les années 1920 de la cantatrice Emma Calvé (1858-1942), provenant du Château de Cabrières (Aguessac Aveyron) acquis, meublé par la famille actuellement propriétaire.
