Qu’est-ce que l’art abstrait lyrique ?

L’abstraction lyrique est un courant artistique non figuratif de l’après-guerre. Ce courant se définit par l’expression gestuelle et intuitive de l’artiste dans une liberté plastique totale. 

L’expression « abstraction lyrique » est utilisée pour la première fois en 1947 par le critique d’art Jean José Marchand et le peintre Georges Mathieu lors d’une exposition à la Galerie du Luxembourg à Paris.

Développée à Paris après la Seconde Guerre mondiale, l'abstraction lyrique est une expression employée pour désigner, en opposition à l'abstraction géométrique ou au constructivisme, une tendance à l'expression directe de l'émotion individuelle. 

Les artistes abstraits ont travaillé plusieurs supports : huile sur toile ou huile sur panneau, mais également acrylique sur toile ou acrylique sur panneau mêlant parfois collages ou d’autres techniques.

Par ailleurs, à partir de 1947, une compétition entre Paris et la nouvelle école de peinture américaine est née à New York. Elle sera suivie au début des années 1950 et jusqu'en 1964, par le lancement d'une campagne de promotion culturelle par les autorités et la critique américaines.

Dès la Libération de Paris, se tiennent de nombreuses expositions d’artistes de cette nouvelle tendance, d'abord dans des galeries d'art privées, telles la galerie Jeanne Bucher, René Drouin, Louise Leiris, Rive Gauche ou encore Conti, puis dans les Salons de peinture, tels que le Salon des Surindépendants, le Salon de Mai créé en 1943 ou le Salon des Réalités Nouvelles créé en 1946.

En 1951, ont été réunis pour la première fois, à la galerie de Nina Dausset, des toiles d'artistes abstraits européens et américains. Cette manifestation fut organisée par Michel Tapié.

Les artistes de l'abstraction lyrique appliquent en quelque sorte les leçons de Vassily Kandinsky, considéré comme l’un des pères de l'abstraction, mais aussi de Hans Hartung et de Joan Miró. 

Le critique d’art Michel Ragon est l’un des principaux défenseurs du mouvement artistique. 

Les origines de l’abstraction lyrique

L'abstraction lyrique désigne un mouvement artistique qui s'étend approximativement de 1945 à 1970 et dont il existe deux principales branches : européenne et américaine. Bien qu'ayant la volonté commune d'exprimer une vérité enfouie au plus profond d'eux-mêmes, elles se distinguent dans leurs orientations et démarches.

Ce mouvement artistique est associé aux courants de l’art informel, dont le matiérisme, le spatialisme et le paysagisme abstrait font partie. 

Voici les différentes branches de l’abstraction lyrique 

1. L'expressionnisme abstrait, appelé aussi “Action Painting” ou “Peintures gestuelles”, est la branche la plus productive de l’abstraction lyrique. Ce concept met l’accent sur l’acte physique de peindre en mettant en évidence la couleur et les impulsions physiques ou psychiques.

2. Le tachisme, défini par les critiques Pierre Guéguen, Charles Estienne et Michel Tapié, se répand dans toute la France et l’Europe au milieu des années 1950. Il se caractérise par des jets spontanés, des éclaboussures, des coulures de couleurs sur la toile posée verticalement ou horizontalement. 

3. Color field painting est né à New York en réaction à l’Action painting. Les artistes travaillent sur de grandes étendues de couleur en supprimant toute profondeur sur la toile. Il revendique son appartenance à l’expressionnisme abstrait auquel il donne un souffle nouveau. Robert Motherwell, Adolph Gottlieb, mais surtout Mark Rothko, Clyfford Still et Morris Louis, considérés comme les chefs de fil.

Le rejet de l’abstraction géométrique et du constructivisme 

L’abstraction lyrique tendait à se distinguer de toutes les autres formes d’abstraction qui existaient alors, telles l’abstraction géométrique ou le constructivisme.

Bien qu’ayant des points communs avec ces derniers, comme leur forme d’expression non-figurative, l'abstraction lyrique cherche à traduire « l’expression directe de l’émotion individuelle ». En clair, les sentiments profonds de l’artiste priment sur tout le reste. Pour cela, de nouveaux procédés plastiques sont mis en œuvre, comme la projection de peinture, brossage, grattage de la toile…

Les artistes de l'abstraction lyrique les plus connus

La volonté d’une expression directe de l'émotion individuelle s'était déjà manifestée chez Vassily Kandinsky dans sa première période des « improvisations » vers 1910. Cette tendance s'exprime aussi chez Alberto Magnelli, qui, célèbre la fin de la première guerre mondiale par une série de 25 toiles, entre 1918-1919, exprima une énergie renouvelée.

Paul Klee et Piet Mondrian développèrent également leur propre langage artistique. D’autres artistes ont suivi leurs traces, dont Hans Hartung puis Joan Miro en particulier. Ils ont déployé, dans les années 1920, d’étonnantes formes plastiques que l’on peut déjà aussi qualifier de lyrisme abstrait. 

Sont associés à l'abstraction lyrique certains artistes de la nouvelle école de Paris, tels que Jean Bazaine, Alfred Manessier ou Jean Le Moal.

Sans être formalisée par un manifeste, l’abstraction lyrique se retrouvent chez plusieurs artistes : Hans Hartung, Jean-Paul Riopelle, Jean-Michel Atlan, Wols, Serge Poliakoff, Roger Bissière, Maurice Estève, Antoine Mortier, Bélasco, François Baron-Renouard, Huguette Arthur Bertrand, Pierre Fichet, Oscar Gauthier, Elvire Jan, Marinette Mathieu ou Chu Teh-Chun.

Tous ont ouvert les voies aux générations suivantes, qui créèrent à leur tour de nouveaux modes d’expression, tantôt axés sur le chromatisme, tantôt libérant complètement la gestuelle de l’artiste. Parmi ses grands noms, on trouvera Nicolas de Staël, Pierre Soulages ou encore Zao Wou-Ki.

Une résurgence de ce mouvement voit le jour au début des années 1970 avec une génération d'artistes nés pendant ou juste après la Seconde Guerre mondiale, parmi lesquels : Paul Kallos, Georges Romathier et Thibaut de Reimpré.

Estimer le prix d’une œuvre abstraite lyrique

Pour chaque estimation, veuillez prendre en compte ces quatre éléments déterminants.

1. L'état de conservation constitue, de nos jours, l'élément primordial pour la détermination des prix. Selon l'état de conservation, le prix peut facilement varier pour des exemplaires similaires.

Un brou de noix de Pierre SOULAGES atteint généralement plusieurs centaines de milliers d’euros, voire quelques millions d’euros, lorsqu'il est en parfait état de conservation. Un exemplaire similaire, en médiocre état, peut en valoir la moitié. Aussi les spécialistes des maisons de vente mettent à disposition des collectionneurs un rapport de condition détaillé des œuvres sur demande. 

2. Le degré de rareté constitue l'autre élément prépondérant. Certaines pièces uniques ou en série sont très recherchées. Parmi les œuvres les plus appréciées de Mark Rothko, citons les toiles non-figuratives des années 1950-1960. A contrario, des œuvres plus répandues sur le marché de l’art valent généralement moins cher. 

3. La date de réalisation de l’œuvre joue un rôle non négligeable dans la détermination du prix. Les œuvres réalisées en milieu et fin de carrière des artistes reçoivent généralement des estimations plus élevées que les œuvres précoces. En effet, dans les œuvres tardives la sincérité du geste est parfois plus impactante.

4. Les dimensions sont à prendre en compte. Les toiles de petite taille valent généralement moins cher que des œuvres de grands formats. A contrario, des tableaux de trop grandes dimensions (dépassant les 2 mètres de large ou de haut), trouvent parfois difficilement acquéreur car elles demandent plus de place pour les exposer.  

5. La provenance et l’historique sont très importantes pour déterminer la valeur d’une œuvre d’art. Les tableaux, sculptures ou objets précédemment en possession d’une galerie ou d’une collection prestigieuse sont très recherchés par les collectionneurs. Les œuvres inclues dans un ouvrage de référence ou qui ont participé à des expositions muséales également.

6. Les objets signés par de grands noms du XIXe siècle ont toutes leurs chances de réaliser des prix d’achat importants. Tel est le cas de Georges Mathieu, Hans Hartung, Jackson Pollock, Mark Rothko, Robert Rauschenberg, Jean-Paul Riopelle, Jean-Michel Atlan, Wols, Serge Poliakoff, Nicolas de Staël, Pierre Soulages, Zao Wou-Ki ou Chu Teh-Chun.

Tous ces éléments sont cruciaux dans l’établissement de la valeur d'une œuvre abstraite lyrique datant du XIXe siècle. Il est recommandé de faire appel à un commissaire-priseur ou à un expert pour procéder à une expertise et ainsi obtenir l’estimation la plus juste.

Le marché des œuvres abstraites lyriques

La cote des œuvres abstraites lyriques peut être extrêmement élevée. Les grands artistes du mouvement ont produit de nombreuses œuvres dont certaines peuvent être à des prix accessibles. De nombreux Salons, galeristes et marchands au cours du XXe siècle, qui ont soutenu les productions, ont permis aux goûts d’évoluer. 

Si l'on étudie plus précisément l'évolution de la cote, l'on constate qu'en moyenne, les prix des œuvres abstraites lyriques ont bénéficié d'une plus-value sensiblement plus importante depuis quelques années.

Une reconnaissance internationale

Ces artistes ont rapidement bénéficié d’une reconnaissance locale et internationale. Ils ont présenté leurs peintures abstraites dans les galeries d’art spécialisées comme la galerie René Drouin et les institutions de l’époque telles que l’Armory Show. Depuis, la cote des tableaux abstraits est en constante progression. Ils se sont imposés comme des valeurs sûres du marché de l’art.

Les peintures abstraites des grands artistes de la seconde moitié du XXe siècle (Mark Rothko, Clyfford Still, Jackson Pollock, Jean-Paul Riopelle, Pierre Soulages et Hans Hartung) sont les plus recherchées du marché de l’art moderne et contemporain. La taille, la qualité d’exécution et la période influent également sur le prix du tableau. 

Les toiles affiliées à l’abstraction lyrique et à l’expressionnisme abstrait américain sont célébrées en salle de ventes aux enchères.

Les tableaux abstraits sont exposés à la contrefaçon, ainsi chaque œuvre mise en vente aux enchères est accompagnée d’une preuve d’authenticité. Pour les toiles des artistes célèbres du siècle dernier, une expertise est vivement conseillée, voire obligatoire dans certains cas. Pour les œuvres plus récentes, les peintures abstraites sont souvent accompagnées d’un certificat d’authenticité qui atteste leur originalité. En cas d’absence de certificat ou de doute, il est vivement recommandé de faire appel à un expert dans certains cas.

L’abstraction lyrique au sommet

Avec des enchères systématiquement multimillionnaires et talonné par Clyfford Still, Mark Rothko est aujourd’hui le peintre abstrait le plus cher du marché de l’art international. En 2015, « No.10 » une huile sur toile abstraite aux couleurs rouge-orangé et noir, ayant appartenu successivement à la galerie Marlborough et la Pace Gallery, trouve acquéreur pour le prix d’achat de 65 millions €. 

Cependant, une grande partie des peintures abstraites s’échangent aux enchères à des prix inférieurs à 50 000 euros. Les prix des toiles gestuelles de Jean Miotte et les peintures de Geneviève Asse débutent à 5 000 euros et peuvent atteindre 20 000 euros. Les prix et estimations des toiles abstraites d’Olivier Debré varient entre 20 000 et 50 000 € et peuvent dépasser le seuil des 100 000 euros lorsqu’elles sont particulièrement emblématiques de l’œuvre de l’artiste et que leur provenance est remarquable. On observe des adjudications similaires pour l’italien Piero Dorazio, la peintre coréenne Seund Ja Rhee Same, Camille Bryen et les américains Paul Jenkins et Norman Bluhm.

La cote de Gérard Schneider est en augmentation rapide depuis quelques mois. Ses œuvres sont de plus en plus recherchées par les collectionneurs et amateurs d’art lyrique. Pour preuve, en juin 2023, l’huile sur toile nommée « Opus 21B » réalisée en 1952, dépasse largement l’estimation haute (80.000 euros), avec un prix d’adjudication record de 270.000 euros. Pour les amateurs, certaines de ses œuvres sur papier restent accessibles à moins de 50 000 €.

Cinq records aux enchères

Certaines oeuvres abstraites atteignent des prix records aux enchères 

1. Mark ROTHKO (1903-1970), No. 10 (1958), huile sur toile, adjugée 65 millions d’euros en 2015 aux États-Unis.
2. Jackson POLLOCK (1912-1956), Number 17 (1951), émail sur toile, estimée 20 000 000 - 30 000 000 euros, vendu en 2021 aux États-Unis à 46 millions d’euros. 
3. Pierre SOULAGES (1919-2022), Peinture, 4 août 1961 (1961). L’huile sur toile estimée 7 000 000 - 10 000 000 d’euros est partie au prix de 15 millions d’euros lors d’une vente aux enchères en 2021. 
4. Hans HARTUNG (1904-1989), T1956-13 (1956), huile sur toile estimée 500 000 - 700 000 euros a été vendu en 2017 à Paris au prix marteau de 2.250.000 euros. 
5. Robert RAUSCHENBERG (1925-2008), Buffalo II (1964), technique mixte, vendue en 2019 lors d’une vente aux enchères à plus de 69 millions d’euros. 

Quelques dernières adjudications MILLON

1. Gunther GERZSO (1915-2000), Composition abstraite (1957), huile sur carton et sable, adjugé à 28.000 euros lors d’une vente aux enchères en 2012. 

2. Hans HARTUNG (1904-1989), T1965-H10, 1965, Acrylique et grattage sur toile, vendu au prix de 150.000 euros en 2022. 

3. Pierre SOULAGES (né en 1919), Sans titre (1998), brou de noix sur papier, marouflé sur toile, adjugé à 122.000 euros en 2017. 

4. Joan MIRO (1893-1983), Sans titre (1945), faïence peinte et émaillée vendue à 122.000 euros à Paris. 

5. CHU TEH-CHUN (1920-2014), Gel (1985), huile sur toile signée en bas à droite, contresignée, datée, titrée et dédicacée, adjugé à 270 000 euros en 2023.

6. Zao WOU-KI (né en 1921), Sans titre (1949), huile sur papier marouflé sur toile, vendue à 150.000 euros. 

7. Serge POLIAKOFF (1900-1969), Forme bleue sur fond rouge (1950), huile sur toile signée en bas à droite adjugée 190.000 euros. 

Estimer et vendre une œuvre abstraite lyrique

Forte de son expérience du marché de l’art, notre équipe constituée d’experts et de commissaires-priseurs vous donne une estimation gratuite de votre œuvre abstraite lyrique Cette estimation prend en compte les résultats obtenus en salle de ventes pour des productions similaires.

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