« L’Orient, soit comme image, soit comme pensée, est devenu, pour les intelligences autant que pour les imaginations, une sorte de préoccupation générale » écrivait Victor Hugo en 1829. Ce n’est pourtant qu’une génération plus tard que Philippe-Joseph Brocard percera les secrets des émaux arabes des XIIIème et XIVème siècle. Celui qui était restaurateur d’objets d’art se prend en effet de passion pour les verreries islamiques et décide de se former à l’art du verre et de l’émaillage pour reproduire ces décors polychromes et dorés qu’il affectionne.
C’est ainsi qu’il redécouvrira le procédé des émaux durs colorés en plein, qui suppose une composition particulière du verre afin que les décors s’y fixent durant la cuisson sans que lui-même ne se déforme ou fonde. Une technique qui allie précision et minutie et fait de lui le novateur de l’émaillage sur verre, suivi en cela par d’autres artistes comme Alphonse Giboin ou Philippe Imberton.
Brocard présente ses premières pièces émaillées avec succès lors de l’Exposition Universelle de 1867 à Paris, suscitant l’admiration d’Emile Gallé qui s’en inspirera dans ses premières verreries des années 1880 (et notamment son vase « Espoir » que l’on peut observer au Musée de l’Ecole de Nancy).
A l’Exposition Universelle de Vienne de 1873, il obtient une médaille d’or, tandis qu’à celle de Paris en 1878 un critique relève « l’entente remarquable de la couleur et du sentiment décoratif de l’Orient ».
En 1884, Brocard prend son fils Emile comme collaborateur et sa production prend alors la signature « Brocard et fils ». Après sa mort, en 1896, la Maison continuera peu de temps sa production sous le nom de Verrerie Brocard, participant en 1904 à l’Exposition Internationale Universelle de Saint Louis (Etats-Unis).
Si certains voient en Brocard plus un technicien qu’un créateur, l’impulsion qu’il a donné à l’art des verres émaillés, et son influence sur Emile Gallé ou les frères Daum, contribuent à faire de lui un véritable précurseur de l’Art Nouveau.